Tout producteur, distributeur ou prestataire de services qui rompt brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie sans donner à son partenaire un préavis écrit d’une durée suffisamment longue engage sa responsabilité et peut donc être condamné à verser des dommages-intérêts à ce dernier.
Précision : la durée minimale du préavis doit être fixée au regard notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou, s’ils existent, aux accords interprofessionnels. En pratique, les tribunaux ont également tendance à prendre en compte la nature de la relation commerciale entretenue par les parties (volume d’affaires, état de dépendance économique de la victime, obligation d’exclusivité, etc.). Sachant que la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut pas être engagée pour cause de durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de 18 mois.
Une faute graveToutefois, une entreprise est en droit de rompre une relation commerciale établie sans préavis en cas de manquement grave de l’autre partie à ses obligations essentielles.
C’est ce que les juges ont décidé dans une affaire récente. En 2005, une société spécialisée dans la mise à disposition de contenus numériques était entrée en relation d’affaires avec un prestataire qui proposait un accès payant à différents services en ligne. Une relation qui avait duré jusqu’en 2013, date à laquelle la première société y avait mis fin, sans accorder de préavis. Le prestataire victime de la rupture avait alors invoqué une rupture brutale d’une relation commerciale établie et demandé réparation du préjudice subi à ce titre.
Si le caractère établi de la relation commerciale ne faisait pas le moindre doute, les juges ont néanmoins estimé que la rupture ne pouvait pas être considérée comme brutale. En effet, le prestataire n’avait pas payé, depuis 2010, des factures pour un montant total de plus de 300 000 €, ce qui constituait, aux yeux des juges, un manquement grave à ses obligations essentielles justifiant la rupture sans préavis.
À noter : le prestataire avait fait valoir que le fait de ne pas être à jour des paiements ne constituait pas une faute grave autorisant une rupture sans préavis. Les juges n’ont pas été sensibles à cet argument.